LES TRAVAUX D’HERCULE
Malgré les jubilations qui ont lieu de part et d’autres en ces périodes de fêtes, il y a des personnes pour qui cela devient un moment où il faut donner plus que d’habitude.
A l’approche des fêtes de fin d’année, chaque service, du moins la majorité des services se vident. La plupart des travailleurs vont en congés pour une ou deux semaines selon la société qui les emploie. D’aucuns en profitent pour cohabiter avec la nature au village, loin du stress et de la pollution des métropoles. L’une des raisons, est qu’en milieu rural la vie est moins chère et on peut bien fêter juste en mettant en avant ses talents au service de la chasse, la pêche ou en devenant un vigneron tout simplement. L’autre raison est qu’ils préfèrent renouer avec leurs racines, ces moments sont meilleurs en familles. D’autres par contre préfèrent et ce de loin, l’ambiance des grandes métropoles, telles Douala et Yaoundé. En effet il est courant, à cette période que la ville brille de mille feux. La communauté urbaine pare la cité capitale de ses meilleurs atours. Les étales des magasins sont achalandés pour attitrer le plus grand nombre de clients. C’est l’effervescence partout, les buvettes ont fait peau neuve, et les baffles crachent des décibels à un rythme frénétique. On frise de la nuisance sonore, mais personne ne s’en plaint, c’est dans l’air du temps.
Ce temps de repos, de ripaille et de réjouissance que l’on observe chez certains fonctionnaires et autres habitants de la cité capitale, ne profite pas à tout le monde. Ceux qui au contraire des autres vont devoir tripler d’efforts, ce sont les commerçants, les gardiens de nuit, les transporteurs, les travailleurs des services sanitaires et les agents de sécurité.
Pour les commerçants et les transporteurs, c’est l’occasion de se faire du beurre avec le trop plein de clients, comme cela est le cas pour Solange, gérante d’un espace gastronomique à Ya-Fe(Yaoundé en fête) qui dit « je gagne trois fois plus que d’habitude, et même si je ne dors pas pendant ces deux semaines d’activités intenses, je trouverais le temps de me reposer avec les poches pleines après les fêtes ». Quant aux gardiens de nuit, travailleurs des services sanitaires et agents de sécurité c’est le moment de doubler de vigilance : les gardiens face aux bandits qui se multiplient pendant cette période et ne dorment pas. Les travailleurs des services sanitaires pour soulager les bobos divers des populations ou encore s’occuper des accidentés, en effet pour mademoiselle Claude Tchakounté, infirmière aux urgences d’une clinique privée « il ya plus d’accidentés en cette période, nous accueillons plus de cinq cas à la fois et en majorité des conducteurs de moto, le reste ce sont les bagarreurs, conducteurs en état d’ébriété, et qui nous parviennent parfois dans un état de coma éthylique suite à une forte consommation d’alcool de fabrication locale, tel le bili bili (boisson exagérément alcoolisée fabriquée de façon artisanale par fermentation du maïs). Nous sommes obligés de faire deux jours successifs de garde pour avoir au moins un jour de repos et nous occuper de tout le monde. Et dans ces moments le personnel apparait insuffisant si bien qu’il arrive qu’on veuille bien avoir quatre à six mains à la fois ».
Les agents de sécurité se chargent de la sécurité de la population mais avec une triple vigilance. L’inspecteur Didacus Fuh Kecha nous explique « d’une part d’un renforcement des unités mobiles des policiers qui à partir de 17h se chargent de diriger la circulation dans les carrefours qui font de grandes affluences, d’autre part des unités qui s’occupent du contrôle des pièces d’identité des chauffeurs et des passagers à bord des véhicules, pour mettre la main sur les brigands qui circulent dans la ville sans badge d’identification et à partir de 22h du contrôle des licences pour veiller au respect de l’heure de fermeture des débits de boisson. Aussi toutes les unités peuvent se retrouver dans une intervention commune pour les cas d’accidents pour un renfort aux unités du corps des sapeurs pompiers ».
Ceci est une répartition hiérarchique des leurs interventions mais à cela faut rajouter qu’il faut parfois séparer des bagarres dans les débits de boisson, secourir des personnes en état d’ébriété avancée qui se retrouvent en plein milieu de la route en période de plein trafic, ou encore faire des aller et retour parfois inutiles à travers la ville à cause des enfants qui jouent avec le standard de la police. De plus avec tout l’inspecteur relève : « il faut faire face aux railleries d’un taximan qui a grillé un feu mais nie, et aux mécontentements des membres de nos familles respectives qui ont dû passer les fêtes sans nous, et j’avoue que ce n’est pas du tout facile. Il faut avoir un moral haut pour ne pas craquer parfois».
C’est aussi ça les fêtes !
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