Le rêve américain des populations de Bamenda

7 octobre 2013

Le rêve américain des populations de Bamenda

Le rêve fait vivre et c’est une citation qui sied bien à chacune de nos vies. C’est parce qu’on a un rêve que l’on se lève chaque jour et on sort pour atteindre notre objectif tôt ou tard.

Les Camerounais sont des rêveurs, mais chaque partie du pays a ses rêves. Les populations francophones de mon pays rêvent de l’Occident et surtout de ces pays francophones où « on vit bien et où il n’y a pas la galère ». Je parle bien sûr des pays comme la France, la Suisse, la Belgique, etc. Je vous épargne des conditions dans lesquelles nous nous y rendons.

Bref chaque francophone a sa « personne en Mbeng », chaque francophone ira un jour en Mbeng(France) parce que « sa tante, son gars, son ami, le neveu de son oncle sont là-bas », il est évident que son tour arrivera.  Bamenda fait partie des régions anglophones du pays tout comme Buéa. À mon arrivée et de nos jours, je me rends peu à peu compte que si les francophones ont un rêve français, les anglophones ont un rêve américain.

Il faut voir le tableau qui s’offre à vous quand vous les regardez. Ils sont assis au bar, dans les cyber, dans une cour, une boutique ou un lieu quelconque. Un seul sujet « l’Amérique », ensuite viennent des pays comme l’Angleterre, l’Allemagne, le Canada, etc. Ils accrochent les drapeaux de ces pays dans les taxis, les maisons, les bars, les écrans de téléphones, de tablettes, partout, y en a même qui font des tatouages (et le pauvre drapeau camerounais alors ?).

Ils ne fonctionnent qu’en dollars, livres sterling et pour faire la conversion d’avec nos F Cfa, ils ont déjà le convertisseur en tête. Ils ne correspondent qu’avec des personnes résidant dans ces pays, ils font des cours et ne visitent que des sites web des établissements scolaires de ces pays. Un rêve qui fait d’eux des paresseux qui se lèvent le matin, rêvent, parlent, discutent et respirent l’Amérique sans savoir ce qui se passe à Foncha street (un quartier non loin d’eux). Leur président c’est Barack Obama et l’un des membres de son gouvernement est sans doute notre président de la République.

drapeau USA à commercial avenue Bamenda

À Bamenda on connaît Adèle, Alicia Key, Beyonce ou Elton John mieux que Stanley Enow. Cet engouement se justifie, car nombreux sont ceux qui gagnent à la loterie américaine « green card ». Ce sont les tenanciers de cybercafés et les photographes qui se frottent les mains quand arrive la période où les candidats doivent participer. Ils connaissent tous les documents à fournir, les conditions pour être éligible et donnent des conseils aux postulants.

Ici à Bamenda, paraît qu’en décembre, c’est la période où ces gens qui vivent chez les Blancs en Amérique, les « Bush faller » comme ils les appellent ici (en hommage à Bush qui en était le président à une époque), viennent rendre visite à leur famille et faire la fête avec les amis qu’ils ont « laissés au pays ».

Une quête permanente pour traverser et se rendre de l’autre côté que se soit à la nage, à pied, ou par les airs, peu importe ! Cela est devenu un vrai business pour les cybers-café où l’on retrouve des bons et des mauvais comme toujours. Des familles entières en compagnie des enfants postulent chaque année d’octobre à novembre. Les gérants de cyber disent être des pros mais on n’est jamais loin de l’escroquerie. Vous le laissez vous filmer en payant pour la photo et l’heure de connexion pour vous inscrire et vous attendez les résultats en guettant votre boîte email de temps en temps. Avez-vous la garantie qu’il l’a vraiment fait ? Non je ne pense pas.

Faut juste espérer et prier pour que votre nom soit tiré au sort pour voyager.Après commence une suite de rêves ou de cauchemars à propos tellement vous êtes angoissé.  D’un autre côté on essaye d’y aller par les réseaux. Pour partir, mes frères deviennent des chrétiens, des homosexuels (dont le Cameroun ne veut pas et qu’il faut protéger), des danseurs, chanteurs, refugiés politiques et que sais-je encore ? C’est bizarre de voir à quel point les familles sont prêtes  à s’endetter pour qu’un membre de leur famille s’y rende, mais de constater que quand il faut sauver la vie de quelqu’un ou encore l’aider à faire un petit commerce pour s’en sortir il n’y a jamais d’argent au Cameroun.

À force de les côtoyer, je pense que je ne vais pas tarder à attraper ce virus. Je vais tenter ma chance à la loterie américaine, devenir une « Bush Faller » pourquoi pas ? Ne vous étonnez pas de me voir rédiger désormais mon article en anglais, porter un blouson de cuir aux couleurs de l’Amérique. Je sais que cela sera un parcours du combattant vu mon nom musulman, mais je garde espoir, l’espoir fait vivre, vous ne croyez pas ?

 

 

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Commentaires

Osman Jérôme
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Salma, tu sais, pour une autre occasion inattendue, tu viens m’arracher de gros éclats de rire. Tu es top, toi hein. A chacun son « Dream ». Donc, a chacun son pays de rêve.
Cependant, ce qui inquiète dans ces situations, c’est le risque de se dormir sur le lit trop vaste de la paresse et oublier de se réveiller. Car, il ne suffit pas de rêver, mais il faut aussi d’être réaliste. Sinon, on va passer toute notre vie à rêver, quoi.

Salma Amadore
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il y a des gens Osman qui sont prêts à rêver toute leur vie hein ce n'est pas ça qui manque en tout cas

josianekouagheu
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Ah Salma quand est-ce que tu m'amènes chez toi à Bamenda? Je veux bien vivre le rêve americain. C'est même ce qui fait la particularité de notre pays. On veut le quitter, aller ailleurs. Mais honnêtement, le chemin est si long et surtout le rêve aussi. On tombe alors dans la clandestinité. ET Lampedousa n'est plus loin!

Salma Amadore
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viens vite Josiane je t'attends

Marius M. Fonkou
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Salma, dans la partie anglophone du pays, on peut être une bush faller après avoir fait une escale au canada. Il est souvent facile d'accéder au canada qu'aux USA. Et lorsqu'on est au Canada, on a plus de chance de vivre facilement le rêve américain.
Si tu veux être une "Obama faller" parce que l'autre n'est plus là, tu devrais d'abord nous faire part de ton amour pour le pays de l'onccle Sam sur ce blog. peut-être faut-il d'abord l'habiller avec les couleurs du drapeau américain comme c'est le cas sur la photo que tu nopus propose.
Super ton billet, j'adore franchement.
Chapeau!

Salma Amadore
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ha ha ha c'est compris Nfonkou je vais y penser"obama faller" c'est chouette ça

odbal
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hello, juste une petite correction. le mot bushfaller vient de bush qui signifie foret. quand qqn va en foret, il revient avec des vivres et de quoi manger pour toute la famille.
ye don fall bush... il est parti se chercher, bushfallers don came, les mbenguistes sont venus. etc
ceci n'a donc rien a voir avec Bush le president. le terme est meme plus vieux.
merci pour la correction.

Salma Amadore
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merci
mais cela me prouve également que la majorité d'entre eux utilisent ce mot sans pouvoir donner la bonne signification car je l'ai obtenu de près de dix personnes à Bamenda

Willy Fonkam
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Justement, "to fall bush" peut être traduit par «prendre la clé des champs» (littéralement «tomber en brousse», rien a voir avec G. Bush). Et un "Bush faller" c'est donc un gars ou bien une go qui a pu s'évader, s'échapper (de la galère du pays, je suppose)

Salma Amadore
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merci Willy c'est noté

Ivy
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haha! bel article Alma... amusant mais tres instructif :)

Salma Amadore
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merci

fc
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Merci Salma,un petit voyage en chine ,cela ne vous fait pas rever!!
Encore merci pour ce billet.

Boukari Ouédraogo
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Comme me le disait quelqu'un que j'ai interviewer recemment, il suffit de faire comprendre à ces jeunes qui s'endettent qu'avec ce argent ils peuvent devenir des hommes d'affaires dans leur pays. Il suffit donc de leur montrer qu'ils peuvent avoir la chance en restant chez eux. Sinon Lampedusa...

Salma Amadore
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oh bouba ce Lampedusa si seulement ils écoutaient tes conseils, mais non ils sont tellement entêtés

Faty
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je me demande si je ne suis pas un extraterrestre pour un africain, car bien autour de moi , au Mali, chacun caresse aussi ce reve de se rendre en europe, quel que soit le pays. L'essentiel est de s'y rendre et de gagner des billets plus gros.... moi je rêvais de vivre dans ma ville natale Tombouctou. D'autres y verrait du scepticisme, mais faut-il perdre toute sa valeur, sa dignité pour se retrouver dans un pays où personne ne te demande qui est ton père? qui est ta mère? en tout cas moi cela ne m'attire point.
Billet vivant petite soeur.
Bonnet!!!!euh je veux dire chapeau en africain...hihi.

Salma Amadore
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je prends le bonnet merci grande soeur mais je viendrais au Mali qu'en penses-tu? c'est aussi mon rêve

fc
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Ma référence a un "voyage en Chine". est à là l'intention de ceux qui ont quittés l'Afrique pour s'installer en Asie. Il y a de très belle réussite.Je remercie la communauté de votre continant pour les grandes discussions qu'elles m'offrent et toujours avec un certain plaisir d'echange.

Salma Amadore
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merci Franck d'y participer également

Roméo Taka
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Bonjour Salma,

Merci pour ce billet. Actualité oblige (le énième naufrage de Lampedusa), la question de l'immigration africaine vers l'Occident est de nouveau au cœur des débats. Ton article a le mérite d'aborder le sujet sous un angle plus léger, voire avec une pointe d'humour.
Encore que... pour répondre au commentaire de josianekouagheu (que je salue au passage ;) ), pour ceux qui rêvent d'aller vivre le rêve américain sans passer par une voie "conventionnelle" ou une lotterie (où les élus sont, par définition, très peu nombreux), le pays de l'Oncle Sam, ce n'est pas la porte à côté: ce n'est pas une mer, mais un océan qui se dresse devant eux. De quoi dissuader les plus téméraires de se lancer dans un périple sans retour...
Du coup, entretenir le rêve américain dans son salon, dans ses conversations ou à travers ses hobbies (écouter du Alicia Keys à longueur de journée, par exemple), eh bien... çà peut paraître excessif, mais çà reste un moindre mal, voire une forme de compensation. Pour moi, ce qui est à déplorer, c'est l'obstination de certains de nos frères à envisager l'immigration (légale ou non) comme l'unique alternative possible pour fuir la pauvreté chronique, la "galère" qui ronge nos villes et nos campagnes. Avoir des rêves d'ailleurs ne nous empêche pas de nous retrousser les manches et de réfléchir à un moyen de subsister et de construire nos vies, là où le bon Dieu a bien voulu que nous voyions le jour...en attendant de pouvoir réaliser un jour ce rêve ;) ! En passant, le mien, c'est d'aller un jour au Japon :)

Au plaisir de te relire!

Salma Amadore
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merci Takachi

Vanessa Koumabo
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Peut être suis je une marsienne mais vraiment je n'ai aucun désir particulier d'aller chez ces gars (Oncle Sam, Pompidou, Mao Tsé toung et que sais-je encore), surtout pas pour y demeurer.
c'est vrai que c'est très beau et donc un lieu ideal pour les balades pendant les vacances dans la mesure du possible. mais sincèrement, moi mon rêve "américain" se passe ici, ici chez nous...

Rose
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très bel article, ma chère Salma. Et j'ai une position, je dirais assez controversée sur le sujet delicat de l'immigration. la vérité c'est quela vie est très dure en Afrique et plus encore au Cameroun. Avoir quelques millions semble certes constituer un fond de commerce éventuel, mais le cout de la vie, les impots, les tracasseries administratives incessants ne permettent tout simplement pas d'etre un opérateur économique HONNETE. vraiment pas au Cameroun en ts cas. j'ai beau aimé mon pays, mais il est difficile d'y vivre sans etre un fonctionnaire (VEREUX) pour dire le moins...

said
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vraiment ,a chacun son reve ,mais moi j'en ai un seul: apres le cameroun natal ,c'est destination le ciel et tant mieu pour vous.