Quand « faire comme une femme »permet de gagner sa vie.
Être une femme ce n’est pas facile, vous me direz être un homme non plus, mais bon je ne peux témoigner que de ce que je suis. Faut mettre les talons qui vous torturent pour paraitre belle (supporter même si cela vous donne des ampoules), faut porter des serviettes hygiéniques, se tresser (sur ce plan, les coiffeuses savent maltraiter nos cheveux), tellement de choses pour lequel on n’a pas vraiment le choix. Les hommes savent bien dire en voyant cela « vous les femmes vous souffrez hein ».
Je me souviens encore de cet homme qui passait à l’émission « télé podium » il s’habillait comme une femme hindou, dansait et chantait aussi. Les hommes et mon père surtout étaient bien étonnés de voir qu’un homme pouvait faire des choses pareilles.
De nos Jours, l’humoriste Safaria imite très bien la voix d’une fillette, aussi « Big Mami » qui imite très bien une femme âgée, ils sont connus pour leur prestation. Il existe une « copine nationale » que nous aimons tous Major Assé. En le regardant sur scène, ses gestes, ses histoires, l’expression de son visage, fait que chaque femme se reconnait dans telle ou telle histoire. Le public se régale quand il fait ses prestations et il est devenu célèbre parce qu’il nous imite tellement bien.
Un autre qui ne cessera jamais de m’étonner c’est l’artiste Petit-Pays. Petit-pays est un artiste à l’américaine qui sait ce qui fera que l’on parle de lui. Avec des pochettes d’album où il est nu, des musiques sur les « pédés », les histoires de Talons qui font « kos kos », etc. Son passage à l’émission Jambo a encore tout confirmé, il avait une robe, un chapeau à large bord blanc, une femme quoi, on dira qu’il est fou ? Non c’est une star et il faut que l’on parle de lui.
J’ai assisté à la prestation d’un homme au marché Nkwen à Bamenda. Habillé comme une « Claudette », une perruque sur sa tête, des ongles vernis, ses talons, il chante comme une femme et vous raconte des histoires de femmes en langue locale. C’est une thérapie par le divertissement pour les vendeuses qui oublient un peu leur malheur en l’écoutant. On lui jette des pièces ça et là et cela le motive, il passe plus de temps et vous raconte ses histoires de couple encore et encore.
Il s’appelle en réalité Clétus, est père de quatre enfants et est marié. Une question trotte dans ma tête, je lui en fais part, il me dit que c’est avec cet argent qu’il réussi à subvenir aux besoins de sa famille. Il était d’abord danseur solo, puis il a constaté qu’il était facile pour les gens qui rient, de donner un pourboire, autant que ceux qui regardent juste votre chorégraphie. Clétus gagne 4 à 7000f par jour. Chaque jour, il change de marché, de quartier et d’histoires pour rencontrer de nouveaux spectateurs.
L’homosexualité a crée un climat de méfiance chez les populations. À Bamenda, ce genre de spectacle qui amusait avant, est devenu une interpellation aujourd’hui. Les populations refusent l’homosexualité et les hommes encore plus. Quand ils voient Clétus, certains regardent ailleurs, changent de destination, ou s’exclament tout simplement « c’est encore quoi ça, vous ne vous cachez plus hein, efféminé !», d’autres encore « quand vous lui donnez de l’argent comme ça, çela le galvanise hein, il fait quoi comme ça ?pédés comme ça ».
Pour ses enfants, c’est un comédien, pour lui, il fait ce qu’il aime en attendant de trouver mieux. Il sait que tout le monde ne peut pas l’aimer ; il a appris à faire avec. Sa femme est sa source d’inspiration, il n’a qu’à la regarder avec ses copines pour être inspiré et raconter une histoire. Il compte reproduire les gestes de cette dernière parfaitement dans un sketch pour femme enceinte, il m’amuse bien car cela s’annonce intéressant, le public va aimer c’est sur.
Il gagne sa vie avec, peut importe s’il doit se torturer avec ses talons, le rouge à lèvres mal mis, des faux ongles, etc. L’essentiel est qu’il s’en sorte et que sa famille « ne manque de rien ». Comme il le dit lui-même « je ne vole pas, je gagne ma vie comme je peux, si cela ne plait pas à quelqu’un, il ne peut m’aider qu’en me trouvant autre chose à faire ».
Homosexualité ? Spectacle ? À vous de juger.
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