Double scrutin électoral au Cameroun, place à la guerre.

21 septembre 2013

Double scrutin électoral au Cameroun, place à la guerre.

crédit photos: Salma
Crédit photo : Salma

Quand il y a les élections au Cameroun, c’est une période animée. Il y a d’abord le bal des candidats avant l’échéance qui vont ça et là dans des villages pour faire des dons et invitent les médias pour être filmés (cette période de rentrée scolaire était favorable pour toucher le cœur des électeurs en les aidant avec quelques cahiers et nécessaires scolaires). Ensuite, il y a ceux qui se chargent d’être sur la plupart des débats citoyens pour défendre les droits « du peuple » (il leur a fallu attendre d’être candidats pour savoir que nous avons des droits, droit au meilleur). Enfin, il y a ceux qui veulent faire différemment des autres et optent pour la drague par les discours le jour-J.

Le contexte électoral actuel au Cameroun présente un tableau particulier.

Dimanche 15 septembre 2013, Bamenda a été envahie par des motos taximen qui portaient de T-shirt des partis politiques et qui faisaient le tour de la ville dans un vacarme assourdissant. Armés de sifflets pour certains, et saouls pour d’autres, ils étaient au volant de leur moto et distribuaient des tracts.

Le mardi 17, les premières arrestations sont apparues. Le candidat Anicet et ses camarades ont été interpellés puis relâchés. À l’origine de cette arrestation, le candidat et sa suite se seraient livrés à la destruction des affiches d’un candidat du « parti des flammes ».  D’après lui, Albert Dooh Collins n’a pas le droit d’occuper les panneaux publicitaires avec ses affiches car la loi le leur interdit. Anicet accuse Elecam, la  commission électorale camerounaise, de jouer à un double jeu et de supporter le parti au pouvoir et dit avoir été refoulé chaque fois qu’il a voulu se plaindre de cas de fraude. Il aurait même croisé sur son chemin des autorités qui ont déclaré, « tu me vois aller déchirer une affiche du RDPC (Rassemblement démocratique du peuple camerounais) ?

 

crédit photos: Salma
Crédit photo : Salma

Alors même qu’il existe encore des électeurs qui ne sont pas entrés en possession de leur carte d’électeur, Elecam s’est lancée dans une enquête pour élucider un mystère. Un candidat aurait adopté comme outil de campagne, des SMS. Il envoie des SMS aux populations en les invitant à voter pour lui. Les membres d’Elecam en charge de ce volet sont en train de suivre une piste capable de les aider à savoir comment il est entré en possession des numéros de téléphone de ces personnes.

Si les yeux tuaient, je serais morte hier. En me rendant à Commercial Avenue, je suis surprise de constater que la route est barrée. Je paie le taximan et je décide de faire le reste du trajet à pied. Quelques mètres plus loin, je me trouve face à une foule qui entoure un podium habillé aux couleurs du SDF (Social Democratic Front). Ils chantaient en chœur l’hymne du parti, ils distribuaient des tracts, riaient, mais ce qui a attiré mon attention est le fait que, parvenu jusqu’à moi, ils ne me donnaient pas le tract et me fusillaient du regard. J’ai voulu savoir de quoi il était question, et c’est une femme qui m’a fait savoir ce qui se passait, elle me dit : « Si tu veux que je réponde va d’abord enlever ton habit là ».

Je jette un coup d’œil furtif sur mon habit et voilà le traître ! Je portais un vieux  « kaba » fait avec un pagne imprimé de l’image du président. J’étais étonnée. Je veux dire ce vêtement n’avait rien à voir avec l’actualité politique actuelle, mais il ma fait perdre une information. À quelques mètres plus loin, des candidats du RDPC me font l’accolade en me félicitant de choisir « le vrai parti ». Je me tire de là très vite, foutue campagne, et moi qui ne gagne rien là dedans. C’est un vêtement, c’est tout.

Je fais un tour à la maison et je reviens. Les candidats du SDF m’invitent à aller voter, à aller retirer ma carte d’électeur et ils me disent aussi que si je rencontre des difficultés pour la retirer, je peux compter sur leur aide. Bref j’ai eu mes informations. Ils seront là tous les jours jusqu’au 30 septembre 2013 pour battre campagne.

Les électeurs et les motos taximen qui sont dans cette campagne électorale n’ont qu’un seul objectif « gagner ma vie », ils sont unanimes en ce qui concerne les candidats : « Je suis là pour mon intérêt, ils me payent pour ce service que je leur rends » déclare un mototaximan. « Je veux boire, manger et avoir quelque chose dans ma poche qui pourra m’aider à survivre pendant quelques jours de campagne. C’est le seul moment où ces candidats sont un peu généreux, après les élections ils n’ont plus rien à foutre de nos vies. Donc à chacun son intérêt, ce sont des malhonnêtes ».

 

crédit photos: Salma
Crédit photo : Salma

Des électeurs du SDF qui, après un meeting organisé à Foncha Street se discutent l’argent qu’il leur a été donné pour leur participation en tant que groupe de danse. Des électeurs du parti des flammes qui pendant le meeting l’interrompent pour s’arracher des morceaux de pagnes, des morceaux de tissus, des morceaux de pain, morceaux de poulet, de la boisson. C’est quoi ?vous n’avez jamais mangé de poulet ? non, vous n’avez pas de vêtement ? non. Mangez des morceaux de pain, du poulet, boire, prendre un T-shirt, gagner 5000F pour voter et passer 5ans de plus dans la misère, c’est triste.

Bien triste réalité hélas. Déjà un nouveau mouvement est né. Au sein de ce mouvement, des jeunes qui se sont mis ensemble et ont donné une conférence de presse pour sensibiliser la population et lui dire qu’elle doit être présente au vote et même pendant le dépouillement pour que tout se passe dans la légalité, désormais il n’est plus question d’influencer les électeurs qui veulent assister au dépouillement. Vivement qu’arrive ce 30 septembre 2013 et nous saurons ce qui a marché.

 

crédit photos: Salma
Crédit photo : Salma

 

 

 

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Commentaires

Josiane Kouagheu
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Ah Salma! Tu as tout dit; tout indiqué, tout dénoncé, tout...C'est la guerre! Je connais tellement d'électeurs qui n'ont pas eu leurs cartes d'électeurs. Tellement. Et les candidats qui sont là pour promettre monts et merveilles. Hier encore, le candidat élu il y a cinq ans, promettait les mêmes choses. Il n'avait rien fait durant toutes ces années-là. Curieusement, il veut encore être élu. Pourquoi? Pas par amour pour nous. Non! Bien triste réalité hélas Salma! J'en ai marre! Beau billet!

Jevi Schilo
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Il est vrai ce scénariot a toujours été le même. Un individu qui fait des promesses falacieuces à une population qui accepte volontier le voter juste pour résoudre un problème ponctuel, c'est le moment adequat pour profiter car après faudra oublier.
Je pense qu'il serait aussi bien que nos journaliste apprenent à faire une communication pacifique, dire les choses telle qu'elles sont mais avec un langage pacificateur.

Salma Amadore
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on parle de l'impartialité du journaliste et je pense que le fait d'utiliser un langage pacificateur est une sorte de masque à moins que je ne comprenne mal