Zoli madam
Avez –vous déjà été dans un marché Mokolo, Marché central, etc ; et que brusquement vous sentez quelqu’un vous tenir la main ? Hé bien je pensais être tirée d’affaire en venant à Bamenda que non, je l’ai retrouvé ici à Commercial Avenue.
La plupart du temps quand cela m’arrivais mon premier reflexe était soit de gifler la personne, soit de secouer mon bras brusquement en m’éloignant, par crainte que ce ne soit un bandit. Quelques mètres plus loin quand mes battements cardiaux étaient revenus à la normale et bien je me rendais compte qu’on me tenait à nouveau le bras. Et là lorsque je baissais enfin les yeux je me retrouvais soit face à une fillette, soit face à un garçonnet qui souriait en me disant des mots que je ne comprenais pas vu qu’ils étaient très mal prononcés si c’est du français. Après avoir demandé deux ou trois fois à l’enfant « quoi ? » pour qu’il répète ce qu’il avait dit et bien je me rendais compte de ceci, au lieu de dire « Pardo ze veu larzent pou manzer » comme il le faisait, il voulait plutôt me dire « pardon je veux de l’argent pour manger ». Là c’est comme si je sortais d’un rêve et je souris devant ces personnes de teint clair des arabes choas qui ont de longs cheveux et sont beaux malgré leur manque d’entretien. La seule différence est que ceux de Bamenda parlent l’anglais.
Ma première réponse « je n’ai pas d’argent petit » ne le décourage pas car à ces mots il se jette encore sur moi en serrant ma main plus fort. Je me retourne et il poursuit « pardo zolie dame » il sourit et me touche la joue. Je ne cède pas et je répète ma première réponse. Il me lâche la main et va chez une autre personne. À Yaoundé pour se débarrasser de ces enfants il suffit de leur dire « viens on part chez moi », là vous les verrez rebrousser chemin et accélérer le pas. Si vous lui tenez la main en le disant et bien vous vous rendrez compte qu’à quelques mètres de vous il y a un homme ou une femme de la même couleur que cet enfant qui vient vers vous. Et vous comprenez tout, c’est le parent, il envoie son enfant flatter et demander de l’argent aux passants. Dès qu’ils ont de l’argent, ils vont le remettre à leurs parents. À midi la famille est réunie dans un coin sur une natte ou un sac tissé et ils mangent je ne sais trop quoi. Je me suis toujours demandé d’où ils viennent pour avoir comme profession : mendiant.
Je n’ai pas toujours été comme ça hein, je donnais, c’est juste qu’au fur et à mesure que j’ai voulu pousser la réflexion je me suis rendue compte que le fait de donner les encourageait à ne pas se battre autrement. Je m’explique, dans les religions et surtout l’islam que je connais un peu, on demande de toujours faire le « salakha » offrande en français. La majorité des musulmans aiment le faire le vendredi ou les jours de fête d’Al ramadan ou d’Al Khébir. Les mendiants, les plus vieux je dirais qu’ils sont invalides, mais pas tant que ça car ils ont la force nécessaire pour se rendre là. Devant les mosquées, ils s’asseyent et posent une assiette, à la fin de la prière, ils reçoivent des paquets de sucre, de l’argent, du riz, bref le nécessaire pour vivre.
En sachant qu’ils recevront cela toutes les semaines ou tous les jours aux heures de prière, ils ne se gênent pas. Ils viennent s’installer là comme un rituel, vous ne pouvez pas imaginer le tas de bonne bouffe qu’ils reçoivent. Ce qui me révolte encore plus est le fait qu’ils mêlent des enfants à tout cela. D’accord ils sont invalides, mais ces enfants qu’ils trainent dans la ville et qui tiennent ces assiettes ne le sont pas eux. Pourquoi ne les envoient-ils pas à l’école ? L’enfant tient l’assiette et une fois qu’il y a de l’argent il doit le reverser dans la poche de l’adulte sinon vous verrez que malgré sa cécité (il a l’oreille assez fine pour savoir si c’est un billet, une petite pièce ou une grosse pièce d’argent que l’on vient de jeter dans l’assiette), il va se servir du bâton qu’il tient souvent à la main gauche pour taper sur l’enfant.
Le jour où j’ai assisté à un tel spectacle, j’ai eu mon compte. Désormais je préfère aider un infirme comme celui que je rencontrais un peu partout dans la ville de Yaoundé. Il avait son carton de bonbons accroché au cou et se trainait au sol en appelant les clients. Lui, je lui donnais de l’argent même si je ne voulais rien acheter. On aide celui qui se bat et non celui qui se sert des autres et leur prive de leur droit pour son bonheur.
D’après vous est ce que la religion encourage la mendicité ?
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