L’aventure 100%jeune
Parler de ce groupe réveille en moi tant d’émotions et je suis sûre que même dans cet article je ne pourrais dire tout ce que je ressens.
Je suis nordiste, ce qui veut dire chez nous au Cameroun que je suis ressortissante de la partie septentrionale du pays. Dans cette région très peu de filles vont à l’école, leur destin est étroitement lié au mariage forcé ou consentant. C’est la raison pour laquelle plusieurs parents préfèrent investir sur l’éducation et l’évolution du garçon. Ils ont pour raison que « la fille est appelée à partir et c’est le garçon seul qui reste et veille sur la maison et les parents ». Ce sont les nombreuses années passée au Sud qui ont peu à peu enlever quelques idées du genre dans la tête de mon père. Il m’a envoyé à l’école et avec tout le confort qu’il pouvait me donner. Dieu merci pas de mariage forcé pour moi.
C’est en classe de seconde donc en 2001 que j’ai pu rejoindre le groupe « réglo » comme on le dit tout fièrement. À cette époque j’avais 16 ans et c’était une joie pour moi de pouvoir voir mon nom écrit quelque part comme un témoignage ou un défi personnel. J’avais lu le premier numéro de cette parution mensuelle par hasard. On le vendait à la sortie de notre lycée. Ce qui m’a attiré sur ce mensuel était son prix (50f) et l’artiste à la Une (Sisqo). Si bien que quand ils ont lancé un avis de recrutement pour les pigistes (Aië !) excusez-moi je n’aime pas ce mot car il sonne à mon oreille comme pigeon et je n’aimerais pas être prise pour un pigeon donc je dirais reporter.
Les réunions avaient lieu tous les mercredis à 13h. Au bout d’un mois de réunion, mes rentrées tardives commençaient à se faire ressentir, ma tante à donc tiré la sonnette d’alarme. J’ai eu droit aux blâmes, aux punitions, aux intimidations de la part de mon oncle (et dieu seul sait comment il est musclé), au fouet et même à la privation de mon argent de poche et de mes séances d’entrainement au hand-ball. Vu la pression à la maison, j’avais dû trouver le prétexte des cours de répétition pour qu’à la rédaction on me laisse rentrer plus tôt.
J’avais beau leur expliquer que c’était une parution et fonctionnait comme un club journal donc il fallait que les reporters proposent les sujets, les discutent, les adoptent avant enfin de se les repartir et que c’est toutes ces actions qui prenaient du temps. Qui nenni, ils ne voulaient rien entendre, ils pensaient plutôt à un mensonge et à la puberté qui me faisait être attirée par les garçons qui me retenaient jusqu’à ces heures tardives dehors.
À la rédaction, mes parutions tardaient à venir car pour écrire un article ce n’était pas facile j’ai du réécrire mon premier article 7fois. Les sept fois étaient dues au fait que soit je ne savais pas rédiger, soit au fait que quand je parvenais finalement à rédiger, le titre de mon article ne correspondait plus au contenu. C’est finalement après deux mois que mon premier article apparu dans une publication. Ce jour là j’ai du m’abriter pour que la pluie ne mouille pas mon journal car cela était la preuve de tous mes retards. Et cela a marché, car ce soir là mon père était très content et j’ai eu le feu vert pour assister à mes conférences.
Le groupe réglo par son journal 100%jeune est très dynamique. Il est la source de mon amour pour le journalisme et le lieu où s’énonce bien la notion de travail en groupe. Chaque reporter est une pièce indémontable du puzzle qu’il représente. Durant toutes ces années il a pu sensibiliser les jeunes à la santé et reproduction des adolescents, lutter pour l’émancipation de la jeune fille, vulgariser l’utilisation systématique du préservatif féminin et masculin, accroitre le désir de la lecture chez les jeunes, informer les jeunes sur les IST/sida, les grossesses précoces et non désirées en français et en anglais. C’est un groupe au sein duquel l’épanouissement et les connaissances en matière de santé sont constants et il sait s’arrimer à la donne je vous dis pourquoi.
Pour être plus proche des jeunes, savoir ce dont ils ont besoin et mettre leur talent en valeur, il a crée les clubs réglos dans la plupart des établissements et les quartiers des différentes régions du pays que les reporters supervisaient. Pour ceux qui n’aiment toujours pas la lecture il a une émission radio 100%jeune live diffusée en français ou en anglais selon la langue d’expression de la région, dans différentes stations et à des jours différents. Le choix de ses jours et des heures de diffusion dépendent de la présence des jeunes à l’écoute(le choix de mercredi après midi est du au fait que ce jour la plupart des établissements libèrent les élèves plus tôt et ils sont supposés être à la maison et à l’écoute). Pour ceux qui sont dans le besoin il a crée « les réglos days » des journées consacrées à l’assistance. Pour ne pas être absent sur la toile, il a crée un site web (www.reglo.org). Et je suis sur que la page Facebook ne saurait tarder.
Grâce à lui de nombreux parents ont pu passer des messages ou éduquer leurs enfants sur des sujets souvent difficile à aborder en famille par la lecture. Les jeunes ont trouvé en son journal le moyen de s’éduquer sur la sexualité et le sexe, mais aussi le moyen de poser leur problème sans gêne et d’y trouver des réponses. De nombreuses personnes vivant avec le Vih/sida ont pu s’exprimer et faire reculer la discrimination, grâce au groupe réglo on est comme le slogan le dit « 100%jeune, 100%réglo ».
Comme toute chose dans la vie, il a bien fallu que je quitte ce groupe pour rejoindre un autre, celui de Mondoblog qui regroupe plus de 100 blogueurs francophones et désormais là où mes œuvres de journaliste s’arrêtent, commencent ceux de bloggeuse.
Commentaires